Offrandes (Critique Cyberfab)
Auteur(s) : Cédric Lefebvre
Illustrateur (s) : Pierô
Éditions : Ludonaute
Genre : jeu de plateau
Mécanisme (s) : tactique, enchères
Thème : antiquité
Année : 2010
À partir de 10 ans
De 3 à 5 joueurs
Durée d’une partie : environ 1 heure
Indicateur de prix : environ 35 euros
Corruption, sacrifice et cours du mouton
Ve siècle avant J.C., les Grecs débarrassés du péril commun que représentaient les Perses ont tout le loisir de se tabasser entre-eux. Athènes contre Sparte, la démocratie contre l’oligarchie et dans leur sillage Thèbes, Délos et Corinthe. Dix ans de guerre et c’est l’enlisement, chacun va essayer de mettre de son côté la puissance des dieux pour l’emporter. Et pour cela, rien de tel que de bons sacrifices… d’animaux évidemment, les grecs ne sont pas des barbares (sic).
Celui qui saura apporter à l’autel le plus grand nombre d’animaux et qui s’adressera aux dieux les plus puissants recevra le plus de soutien divin et l’emportera.
Offrandes : mécanismes de jeu
Chacun des joueurs (de trois à cinq) dirige une cité grecque et va tenter de gagner la faveur des dieux en sacrifiant des animaux. Les sacrifices seront d’autant plus efficaces qu’ils seront faits à un dieu puissant et avec des animaux nombreux et de grosse taille. Il existe cinq types d’animaux d’importance croissante : poule, porc, chèvre, mouton et bœuf.
Les autels des dieux sont aussi hiérarchisés selon leur puissance traduite par un modificateur :
– trois dieux (+5) : Héphaïstos, Mars et Hermès ;
– trois dieux (+10) : Athéna, Héra et Aphrodite ;
– deux dieux (+15) : Artémis et Apollon ;
– deux dieux (+20) : Hadès et Poséïdon ;
– Zeus (+25).
Pour réussir à effectuer un sacrifice chaque joueur va devoir à la fois acquérir un certain nombre d’animaux d’un type particulier, les purifier et les décorer de fleurs. Cela se traduit par la position de jetons sur un plateau qui possède trois échelles : celle du paysan, celle de la porteuse d’eau et celle du porteur de fleurs.
Graduée de 1 à 5 l’échelle du paysan permet d’obtenir la qualité des animaux sacrifiés. Si son pion est sur le 4, il est possible d’avoir des moutons.
Les échelles de la porteuse d’eau et du porteur de fleurs, graduées de 0 à 5 donnent le nombre d’animaux maximum pour un sacrifice. Par exemple pour sacrifier trois moutons il faut non seulement avoir le quatrième cran de l’échelle du paysan mais aussi être sur le 3 de chacune des échelles des deux autres.
Ensuite il faut l’autel du dieu… un seul joueur peut placer son pion sur l’autel d’un dieu et lui seul pourra sacrifier à ce dieu. Le gardien du temple permet l’accès aux autels : les cinq différents grades d’autels constituent son échelle à lui, où les joueurs placent leurs pions pour pouvoir ensuite sacrifier à ces autels.
Trois autres personnages ont une échelle propre :
– la Prêtresse dont les prières permettent à chaque tour d’avancer sur l’échelle de dévotion qui fait le tour du plateau et dont le score final donnera le vainqueur de la partie ;
– le Corrupteur qui permet de filouter pour faire reculer le pion d’un adversaire et avancer le sien ;
– le Garde qui permet de se mettre à l’abri du Corrupteur.
La position des pions sur les échelles est cruciale, d’autant plus que si les pions peuvent cohabiter sur un même niveau des échelles, ils ne peuvent pas le faire sur la case la plus haute. Un seul pourra avoir les meilleurs animaux ou le plus haut niveau de corruption, etc.
Pour pouvoir faire avancer son pion sur l’échelle d’un personnage, il faut acquérir celui-ci, au moyen d’enchères. Chaque joueur reçoit dix drachmes par tour. Le tour de jeu va commencer par des enchères. Chacun va à son tour proposer deux personnages et une mise pour les acquérir, ce qui donnera lieu à des enchères, le plus offrant l’emportant. Si le joueur n’a pas remporté l’enchère il peut en faire une autre avec deux autres personnages. Celui qui acquiert un personnage fait monter son pion d’un cran dans l’échelle, et si besoin, remplace celui qui l’a précédé au plus haut niveau.
La phase corruption permet, dans l’ordre de l’échelle de corruption, de défavoriser un adversaire sur une échelle… mais la corruption est bloquée par le Garde s’il égale ou dépasse le niveau du Corrupteur.
Les offrandes peuvent se faire ensuite, sur l’un des autels auxquels a accès le joueur, avec le nombre et la qualité d’animaux qu’il peut atteindre. Il est possible d’occuper un autel vide ou, plus malin, de remplacer une offrande antérieure par une au moins égale.
En fin de tour sont comptés les points de dévotion accordés par les sacrifices de ce tour, ainsi que ceux donnés par la Prêtresse. Le premier qui atteint 100 points met fin à la partie.
À ce moment-là sont comptés les points liés aux autels des dieux occupés (de + 5 à +25) qui s’ajoutent aux points précédemment glanés… et déterminent le vainqueur, qui n’est pas forcément celui qui a atteint les 100 points en premier.
Tactiques et coups foireux
Offrandes demande aux joueurs une attention “multitâches”. Il faut à la fois se concentrer sur les sacrifices possibles (trois personnages), sur le Temple (deux personnages) et sur la corruption (deux personnages), sans oublier de faire attention au score général qui évolue lentement.
La tactique se traduit par le système des enchères qui permettent d’obtenir les personnages et d’agir sur leurs échelles. Vaut-il mieux avoir une avancée à coup sûr et la payer au prix fort ou profiter de la désaffection d’un personnage pour avancer à moindre coût ?
Il est bien sûr impossible d’avoir à la fois les meilleurs sacrifices, un Garde infaillible, un Corrupteur hors pair et l’autel de Zeus, il faut donc transiger, faire des choix, s’adapter… et essayer de ralentir les ennemis qui semblent les mieux placés.
L’avis de Globul
Le système de jeu d’Offrandes est redoutable. Il laisse chacun devant ses choix, avec sans cesse la tentation de renforcer sa stratégie ou d’en diverger pour saisir une opportunité. Par ailleurs le bluff et les manœuvres aux enchères permettent de faire la différence ponctuellement. Il faut donc réfléchir plus et plus vite que les autres, sans pour autant perdre de vue ses buts et éviter de les poursuivre de manière trop transparente.Une critique importante néanmoins : l’univers du jeu est presque accessoire dans l’affaire. Il s’agit d’un jeu froid, calculateur et l’on pourrait tout aussi bien représenter une multinationale sur les cours des matières premières en Amérique du Sud dans les années 30 qu’une cité grecque au Ve siècle. Les illustrations sont chouettes mais il manque une réalité, une ambiance à cet univers antique qui fasse quelque peu oublier la mécanique du jeu, au demeurant excellente.
L’avis de Lidael
J’ai découvert Offrandes à l’occasion du FLIP 2010, une belle surprise, d’autant que je ne me dirige pas naturellement vers les jeux d’enchères en règle générale (ce n’est pas que je n’aime pas perdre, mais quand même…). Mais, sûrement parce que toute la mécanique est bien huilée, j’aime vraiment bien Offrandes. Développer sa propre stratégie, s’adapter en fonction des choix des adversaires, surenchérir, faire des sacrifices, bluffer un peu, corrompre les autres, le tout mélangé fait d’Offrandes un jeu assez tactique et dynamique à côté duquel il serait vraiment dommage de passer. Petit bonus, Offrandes peut aussi être joué à deux, cliquez ici pour télécharger l’adaptation officielle des règles.